UNE SERIAL KILLEUSE AU PAYS DE L'ANKOU
Née le 17 Juin 1803 au Hameau de Kerordevin
près de PLOUHINEC (Morbihan), la jeune
Hélène (ou Hélènne selon son acte de naissance), enfant choyée élevée dans une
petite ferme d'une famille de cultivateurs pauvres, est nourrie des légendes de
la Basse-Bretagne.
En 1810, elle est envoyée chez une tante qui
travaille comme domestique dans un presbytère de Bubry, et devient elle-même
domestique. Elle n’a que 7 ans.
La gamine parle à peine le Français. Elle est
très introvertie, et dévote. Passant
d’un presbytère à l’autre, elle est travailleuse et devient cuisinière.
Persuadée
d’’être « inquiétée par
l’ANKOU », figure de « L’Ouvrier de la Mort » dans la culture
bretonne, elle est notamment traumatisée par ce personnage de l'ANKOU, dont
elle va devenir l'incarnation pour surmonter ses angoisses.
L'Ankou est la
personnification de la mort en Basse-Bretagne, son serviteur (obererour ar
maro). C'est un personnage de premier plan dans la mythologie bretonne,
revenant souvent dans la tradition orale et les contes bretons. L'Ankou est
parfois — à tort — confondu avec le diable, très présent aussi dans la
mythologie bretonne.
Son rôle est de collecter dans sa charrette grinçante (karr / karrik an
Ankoù, char de l'Ankou ou karrigell, brouette) les âmes des défunts
récents. Remplissant ainsi un rôle de « passeur d'âmes », l'Ankou est
à considérer comme une entité psychopompe.
Lorsqu'un vivant entend le bruit de la charrette (wig ha wag !),
c'est qu'il (ou selon une autre version, quelqu'un de son entourage) ne va pas
tarder à passer de vie à trépas. On dit aussi que celui qui aperçoit l'Ankou
meurt dans l'année.
Une trajectoire de vie banale et laborieuse qui va connaître un accident de
parcours déterminant.
En cette année 1833, Hélène Jégado, 30 ans, est congédiée par son
employeur, le Curé de Séglien. Motif « un goût immodéré pour la
boisson ».
Elle se fait rapidement embaucher chez l’Abbé Le Drogo, dans la paroisse de
Guern (près de Pontivy).
Entre juin et octobre, sept des huit personnes qui séjournent au
Presbytère, dont une fillette et Anna, la propre sœur d’Hélène Jégado, ainsi
que l’Abbé, passent de vie à trépas dans des conditions bien mystérieuses.
Unique survivante de l’étrange épidémie, la dévouée cuisinière n’est pas
soupçonnée. Si l’on évoque le choléra ou la fièvre typhoïde (l’arsenic utilisé
par la domestique provoque des symptômes très proches), une autopsie est
pratiquée sur le corps du Saint homme. On ne trouve rien sur les causes du
décès.
La cuisinière quitte Guern et retourne travailler à Bubry, comme si de rien
n’était.
Dans les faits, Hélène est, à compter de ce jour devenue « La
Jégado » l’empoisonneuse.
Huit ans durant, jusqu’en 1841, les ragouts mortifères d’Hélène continuent
leur macabre office.
Des assassinats qui s’accompagnent de vols, mais aussi de déprédations des
biens mobiliers spectaculaires.
Curieusement, le proche voisinage ne semble rien voir ni rien entendre.
De manière tout aussi inexpliquée, la Jégado se fait oublier pendant une
dizaine d’années, ne perpétrant aucun crime, juste de menus larcins.
En 1850, elle est embauchée chez Théophile Bidard de la Noé, Député d’Ille
et Vilaine et juriste.
Et là, ses vieux démons ressurgissent.
A l’aide d’arsenic, elle empoisonne la gouvernante et une servante.
Une telle affaire, chez un notable de la ville, fait grand bruit.
L’entourage du
député s’émeut, s’interroge, réclame une enquête.
Celle-ci débute le 1er juillet 1851.
Lorsque le Juge d’Instruction se présente au domicile du Député, il détecte
chez Hélène Jégado des réactions qui l’interpellent. Il investigue dans le
passé de la cuisinière, note de troublantes coïncidences. Hélène Jégado
soupçonnée est arrêtée. Elle nie tout
en bloc. Aussi, à défaut de preuves, la justice se contente de l'intime
conviction du juge d'instruction et la chambre des mises en accusation de
Rennes la renvoie devant la Cour d'assises d'Ille-et-Vilaine.
L’acte d’accusation
ne retient que sept cas d’assassinats par empoisonnement, alors que le nombre
de victimes est évalué à plus d’une trentaine.
Les faits antérieurs
à 1841 tombent sous le coup de la prescription.
Femme pieuse, Hélène
se confesse à l'abbé Tiercelin et avoue ses meurtres en prison, la veille de
son exécution. Ces révélations, qu'elle autorise à rendre publiques après son
décès, se révèlent pourtant peu fiables, certains crimes ayant été omis et
d'autres probablement ajoutés.
Pour lire le procès c’est
ici
Hélène Jégado est
guillotinée au petit matin, le 26 février 1852, place du Champ-de-Mars
(aujourd'hui Esplanade Charles-de-Gaulle).
Sa dépouille et
notamment son cerveau sont autopsiés par le premier chimiste de la faculté des
sciences de Rennes. Ses restes sont ensuite déposés dans la fosse commune du
Cimetière du Nord.
L'exécution d'Hélène
Jégado sur le Champ de Mars à Rennes met fin à une carrière criminelle de
dix-huit ans, facilitée par le fait qu'à cette époque la région est touchée par
des épidémies de choléra dont les symptômes se rapprochent de ceux de
l'empoisonnement à l'arsenic.
Voici la recette du
gâteau d’Hélène (Mais sans l’arsenic)
Ingrédients :
- 250 g de farine
- 100 g de beurre
- 100 g de sucre en poudre
- 75 g de fruits confits en morceaux
- 1 cuillère à soupe de raisins secs
- 50 gr d'amandes hachées
- 2 oeufs entiers
- 1 jaune d'oeuf (dorure)
- 5 g de bicarbonate de soude
- 1 pincée de cannelle en poudre
Comment procéder :
- Dans un saladier, mettre le sucre, la cannelle, le bicarbonate et les oeufs.
- Ajouter le beurre en petits morceaux.
- Mélanger le tout sans oublier d'écraser le beurre afin qu'il se mélange facilement aux autres éléments.
- Ajouter petit à petit la farine.
- Pétrir le tout pour obtenir une pâte lisse.
- Ajouter les raisins secs, les fruits et les amandes hâchées.
- Pétrir une nouvelle fois. Votre boule doit être lisse mais pas trop ferme.
- Fariner un moule et y mettre la pâte.
- La tasser avec la main et la dorer avec un jaune d'oeuf.
- Décorer avec une fourchette.
- Mettre à four vif.
Postérité
« La
Jégado » fait l'objet de nombreuses estampes, complaintes, biographies
plus ou moins romancées. Elle est notamment le sujet de nombreux
« canards », feuilles volantes en français diffusées par colportage (Complainte
d'Épinal) et de complaintes en langue bretonne
(complainte de P.M. Jafferedo, imprimée à Hennebont en 1900). Elle devient une espèce de croque-mitaine, personnage maléfique qu'on menaçait
d'appeler pour forcer les enfants à manger leur soupe. Une gwerz en 57 quatrains ("Guerzen buhe H.
Jegadeu"), écrit en 1900, raconte son histoire sinistre.
En
2006, Pierre Mathiote réalise pour France 3 La Jégado, un docu-fiction
avec Taïra Borée dans le rôle-titre.
Le
Musée de Bretagne de Rennes possède le masque mortuaire d'Hélène Jégado dont on avait
recherché la « bosse du
crime » lors de
l'autopsie réalisée à la Faculté de médecine de Rennes.
En
Bretagne aujourd'hui encore, plusieurs pâtisseries proposent des « gâteaux
d'Hélène Jégado », à l'angélique pour imiter la couleur verte que
prenait le gâteau arsénié à la cuisson, et aux amandes qu'Hélène utilisait pour
masquer le goût amer de l'arsenic, mais garantis sans arsenic. La recette a été signalée sous le nom de Gâteau
breton d'Hélène Jégado par Simone
Morand dans son livre Gastronomie
bretonne d'hier et d'aujourd'hui en 1965.
En
2013, Jean Teulé publie Fleur de tonnerre, biographie romancée d'Hélène Jégado.
Le film Fleur de tonnerre , sorti en 2016, en est une
adaptation.
En
2015, le groupe de rock-celtique Kalffa écrit
La Jégado, une chanson consacrée à Hélène Jégado.
En
2016, le groupe de thrash metal Hexecutor se sert de l'empoisonneuse bretonne
pour composer une chanson, intitulée Hélène Jégado.
En
2017, Olivier Kéraval et Luc Monnerais consacrent un album de bande dessinée Hélène
Jégado, ascension vers l’échafaud, premier tome de la série Arsenic
aux éditions Sixto. En 2019, Tatiana Le Petitcorps et Yves-Marie Le Texier
coécrivent le spectacle "Intron Arsenik" où ils suivent les pas
d'Hélène à travers la Bretagne.
Filmographie
Documentaires télévisés
- « Le cas d'Hélène Jégado » le dans En votre âme et conscience sur RTF Télévision. Dans lequel Hélène Jégado est incarnée par Maria Meriko.
- « Hélène Jégado, L'empoisonneuse bretonne » de la série Des crimes presque parfaits, sur Planète+ CI.
Sources
Wikipédia - Secrets d’Histoire N°14 - Gallica - Archives du Morbihan - You tube
Quel parcours ! 😱 Mieux valait ne pas croiser son chemin...
RépondreSupprimerQuelle histoire ! Parfaitement documentée, bravo c'est passionnant. Encore une femme qui utilise l'arsenic, décidément...
RépondreSupprimerAh ! La dame Jegado ! Les archives départementales d'Ille-et-Vilaine avait justement proposé une exposition sur elle dans la suite de la bande dessinée de 2017. Encore une bonne lecture !
RépondreSupprimerPas vu, mais je pense qu'elle est assez connu dans l'ouest de la France ! Merci !
SupprimerBrrr! Ça fait froid dans le dos!
RépondreSupprimerOh, que oui, on se souvient de la Jegado ! (pour peu que l'on s'intéresse aux tueurs-nés et à leurs crimes)
RépondreSupprimerVery thoughtful blogg
RépondreSupprimerMerci !
RépondreSupprimerI thoroughly enjoyed this blog, thanks for sharing.
RépondreSupprimerMerci à vous de me lire. Bonnes fêtes
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