LETTRE DE DENONCIATION
Monsieur le Feldkommandant,
Excusez-moi
de ne pas traduire ma lettre en Allemand, car je ne connais cette langue.
Je viens vous
signaler qu’un jeune homme de L’Herbergement prisonnier dans un camp avait réussi
à s’évader de ce camp. De plus pour se mettre à couvert, il s’est fait
démobiliser en zone non occupée, ayant franchi la ligne de démarcation de nuit
habillé en civil.
Cet ex prisonnier est revenu chez lui, il s’est venté à
plusieurs reprises d’avoir pu s’échapper à la barbe des sentinelles
allemandes. En outre, il raconte les soi disant mauvais traitements que
les Allemands infligent aux prisonniers Français. De ce fait il nuit aux
intérêts de l’armée allemande.
La,
il ne pourra nuire, il ne mérite que cela. Si vous voulez des preuves, allez à
l’Herbergement. Tous les gars du pays savent ce qui s’est passé. Certainement l’intéressé niera son évasion,
mais il s’est bien évadé. La famille ayant reçu des cartes provenant d’un
camp de prisonniers.
Voici
l’adresse de cet ex prisonnier
« Monsieur DAVID Clément, Le Bois
Chollet, L’Herbergement (Vendée).
L’Herbergement
se trouve sur la route de Montaigu à la Roche sur Yon.
Veuillez
agréer, Monsieur le Feldkommandant,
mes salutations empressées. »
Et
comme de bien entendu, un matin les Allemands déboulent à la maison de Clément.
« Vous, Prisonnier Evadé…… »
Clément
nie, montre ses papiers, les Allemands vérifient et finissent par le laisser
tranquille. Ouf, il a eu chaud, heureusement ce n’était pas la Gestapo, et les
Allemands étaient de bon poil, tout leur souriait à ce moment là.
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Clément
DAVID a effectivement été fait prisonnier le 9 juin 1940 au TRICOT (Environs de
Montdidier). Il est gardé à CAMBRAI jusqu’au 15 juillet 1940.
Détenu
ensuite à LE CATEAU CAMBRESIS le 8 octobre 1940, le commandant allemand réunit
les prisonniers français (1200 hommes) à la Mairie de BEAUMONT EN
CAMBRESIS en vue de leur départ pour l’Allemagne.
Clément
décide aussitôt avec un copain de la Copechagnaire, de s’échapper. Trompant la
vigilance des gardiens, ils se sauvent à travers champs en se cachant. Ils
marchent un jour et une nuit et rejoignent une gare où un mécanicien les fait
monter dans son train à charbon, les cachant dans le tender.
Ils
arrivent à l’Herbergement et la Copechagnaire après 6 jours de cavale, le
problème est qu’ils n’ont pas leurs papiers de démobilisation prouvant qu’ils
n’ont pas été faits prisonniers, mais libérés par l’Armistice de Pétain.
Ils
vont donc aller en zone libre passer l’Isle à Montpont Menesterol pour avoir
des papiers les libérant de leurs obligations militaires et les dédouanant de
leur captivité. Ils sont aidés dans leur périple par des cousins de Clément qui
habitaient vers Périgueux.
Bien
entendu, tout se sait, et ils racontent leur histoire aux copains, qui le
disent à d’autres, et c’est ainsi que certains plus mal intentionnés que
d’autres écrivent des lettres de dénonciations.
Cela
a été chose très courante en 39/45 malheureusement.
En
1945, les FFI s’emparent de la Kommandantur de la ROCHE SUR YON, et découvrent moult
papiers dont la fameuse lettre de dénonciation faite à l’encontre de Clément.
Ils la lui donnent, les FFI veulent trouver le
coupable, c’était le temps de la chasse aux collabos.
Clément
s’y est toujours opposé, craignant de découvrir quelqu’un qu’il connaissait
trop bien et qui aurait été fusillé.
C’est
tout à son honneur !
Les
Français ont massivement dénoncé sous lʼOccupation. Loin dʼêtre cachée, loin dʼêtre un acte
individuel honteux, la délation est un acte social, un devoir. Si tout le monde
est concerné, ennemis de l’état, communistes, résistants, gaullistes,… la
dénonciation antisémite reste sans aucun doute la plus redoutable. Elle
représente 15% des actes de dénonciation mais chaque lettre, chaque information
est immédiatement vérifiée et le dénoncé traqué.
D’après l’ouvrage La Délation dans la
France des Années Noires (sous la direction de Laurent Joly, Perrin,
Avril 2012
Loi du 25 octobre
1941 votée par le gouvernement de Vichy fait
de la dénonciation une
"obligation légale".
Sources
familiales – Lettre de dénonciation et récit envoyés par le fils de Clément
DAVID, cousin de ma Maman
Pas très joli, tout ça... En tout cas merci pour ce passionnant article !
RépondreSupprimerMerci ! effectivement pas très joli, mais c'était une autre époque !
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