Bien que je ne l’aie connu qu'à 18ans, moment où
j'ai rencontré celui qui est devenu mon mari, j'ai l'impression que cette
musique a toujours fait partie de ma vie.
Mon mari m'a fait découvrir au début de notre
rencontre les festou-noz, ou autres bals folk. Puis la vie familiale avec les
enfants a pris le dessus, mais cette musique a toujours été présente dans notre
vie.
Depuis quelques années, les enfants étant devenus
grands, nous avons renoué avec la danse bretonne, et mon mari s'est remis tout
naturellement à la bombarde (qu'il avait pratiquée étant plus jeune)
Les instruments utilisés dans ce groupe (alliant
tradition et modernité) sont très variés - veuze, bombarde, biniou koz, flute,
guimbarde, harmonica, guitare folk, guitare basse, djambé, caisse claire,
accordéon et autres instruments)
En cette fin de XXème début XXIème siècle, la
musique bretonne se porte bien. Elle est de toutes les fêtes, de nuit comme de
jour, de Nantes à Brest et de Fougères à Douarnenez.
Les sonneurs et chanteurs ne se comptent plus et
les formations professionnelles et amateurs abondent.
Dans les années 1960 le mouvement folklorique
culmine. On assiste partout lors des fêtes de l'été à des défilés de joueurs de
biniou, de bombarde, suivis par des danseurs en costumes traditionnels.
L'apparition des festoù-noz
Le Festival de Cornouaille en 1964 sera le
premier à intégrer le fest noz à son programme. Après 1970, devenu une
véritable mode, il met la Bretagne en effervescence, provoquant un engouement
populaire massif qui dépassera les limites du pays.
On est loin des fêtes folkloriques qui présentent
à des spectateurs passifs un tableau superbe, mais pour le moins figé "à
la gloire d'un patrimoine et de valeurs disparues". Le fest noz, par
essence, permet à tout à chacun de vivre la musique populaire de l'intérieur,
chaque participant étant un maillon des danses en chaîne qui s'y succèdent.
Lancé à partir des pays où la tradition demeure vivante (ou du moins très
présente aux mémoires) s'abreuvant aux meilleurs sources, ce type de bal bien
particulier offre pour la première fois une solution viable de réintégration
d'une partie de l'héritage culturel dans la vie quotidienne de la jeune société
urbaine bretonne.
Les années 70/74 voient la convergence de
plusieurs mouvements sociaux, politiques et culturels qui se renforcent l'un
l'autre par l'intégration à leur cause d'une musique populaire
"bretonne".
En ce qui concerne le retour aux sources
musicales, si le mouvement breton participe largement au renouveau, il se
nourrit aussi d'autres courants culturels. C'est le Paris des années 1966/1972
qui sera le creuset du vaste mouvement folk qui déferlera bientôt sur la France. Les bretons
émigrés, rêvant de faire évoluer cercles celtiques et bagadoù, y rencontrent
des musiciens profondément influencés par les leaders folk song américain ou
ceux de folk clubs anglais.
Les groupes folkloriques n'ont plus l'exclusivité
de l'usage des vielles, cabrettes et autres musettes berrichonnes, tandis qu'on
redécouvre les complaintes et les chants à danser français, et qu'on s'applique
à en donner une interprétation vivante.
Le public et surtout la jeunesse ne s'y trompe
pas - c'est la naissance à Lorient d'un Grand "Festival inter
celtique", des premiers festivals folk, des grand-messes de la musique
bretonne à Paris.
Ainsi la musique bretonne se dépouille de son
folklore pour entrer de plein pied dans la société contemporaine, devenant
même, grâce au folk le porte drapeau d'un pays à forte identité culturelle à
l'image de l 'Irlande.
Dans le sillage de Stivell, on assiste à une
véritable explosion musicale, portée par la déferlante des festou-noz. Vers
1973 une multitude de groupe "folk bretons" voit le jour.
Parmi les plus connus, on citera les
"DIAOU-LED AR MENEZ, SONERIEN DU, KANFARTED ROSTREN, TIR YANN an NAONED,
BLEIZI RU, tous encore en activité plus de vingt ans après.
Parallèlement, nombre de jeunes musiciens,
souvent d'origine urbaine, formés pour beaucoup par les cercles celtiques, se
lancent dans des enquêtes de terrain, allant à la rencontre de chanteurs et
musiciens âgés.
Ils rêvent de découvrir quelque mythique
"voix sorties des âges", ou plus prosaïquement des airs originaux à
sonner au prochain fest noz.
Tous tentent de redonner une identité et une
couleur à la musique qu'ils interprètent, car contrairement aux folkloristes de
l'avant guerre, ces nouveaux collecteurs rejouent et rechantent eux-mêmes les
pièces qu'ils recueillent.
Une musique en devenir
Les sonneurs de l'ancienne civilisation paysanne
bretonne ont su intégrer les airs de contredanses et de danses en couples, la
clarinette et l’accordéon diatonique, voire plus récemment le saxophone et
l’accordéon chromatique, sans que la tradition musicale dont ils étaient
porteurs y perde son âme.
Leurs successeurs, dans la nouvelle société
urbaine contemporaine, ont-ils réussi à digérer, dans cette deuxième moitié du
XXème siècle, une avalanche de nouveaux instruments et de style musicaux profondément
différents de tout ce qui était connu auparavant, du jazz au rock, de la
guitare à l’orgue électrique puis au synthétiseur !
Nombre de groupes ont relevé le défi et ont
adopté basse, batterie et autres guitares électriques sans renoncer, bien au
contraire, à proclamer qu’ils font de la musique bretonne.
Pour contrebalancer l’arrivée massive de ces
instruments envahissants et nontypés, les revivalistes ont tenté de greffer en
Bretagne, ceux en usage dans d’autres pays celtiques ; cornemuse écossaise,
harpe celtique, uilleann-pipes, le tin whistle, flûte traversière en bois,
Parallèlement le répertoire des pays celtiques
est devenu coutumier en Bretagne.
Au fil du temps et de l'intégration de nouveaux
venus, la musique bretonne s’avère de plus en plus complexe, chaque musicien
suivant sa propre voie parmi un éventail toujours plus large de styles et de
combinaisons orchestrales.
Au cours du dernier demi-siècle, la musique
bretonne a traversé plusieurs modes, réussissant non seulement à leur survivre,
mais à y puiser chaque fois une vitalité nouvelle. A la vague folklorique s’est
substitué la vague folk et celtique, puis, dans une moindre mesure, celle de la
« musique traditionnelle » et même du jazz ou des musiques d’Europe Centrale
La jeunesse bretonne actuelle a grandi en
côtoyant une musique traditionnelle « dé marginalisée », portée par des
artistes réputés. Les sonneurs, les festivals, les associations sont maintenant
profondément enracinés dans la vie locale.
Tandis qu’au seuil du troisième millénaire
s’élabore lentement une musique populaire s’appuyant sur de solides racines,
les formes musicales de l’ancienne tradition n’ont jamais été « aussi belles,
aussi profondes, aussi généreuses », selon le mot du sonneur Jean Baron. Elles
font désormais partie du nouvel art de vivre breton.
Un siècle après avoir atteint son apogée en
couple bombarde-biniou, la musique traditionnelle bretonne est de nouveau
appréciée et enseignée. Ancrée dans le passé, elle a su renaître sans se figer
dans un folklore sans envergure.
Aujourd’hui, elle se tourne vers le futur.
Culture vivante dans toutes ses dimensions, forte de ses racines retrouvées et
toujours respectées, plus que jamais rebelle aux lois de l’uniformisation, elle
s’évade pour mieux se laisser écouter sur les chemins de la créativité
artistique.
Textes extraits du très beau livre "MUSIQUE
BRETONNE - Histoire des sonneurs de tradition "Le Chasse Maré - Armen
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